Risques d’un métier passion

Je reprends ici quelques éléments de deux ateliers que j’ai animé lors du festival Gônes&Cies pour des compagnies artistiques (jeunes publics) en 2023 et 2024. J’élargis dans cet article à l’ensemble des métiers passion.

Tout métier peut être un métier passion.

Idéalement, ne devrions-nous pas toutes et tous vivre notre métier comme une passion? Nous avons envie de répondre oui. Cependant, vivre son métier comme un métier passion entraîne des risques qui sont à mesurer et prendre en compte.

Adosser ensemble les termes « passion » et « métier » peut interroger

La passion signifie :

  • Engagement personnel fort,
  • Implication de ce qui fait sens pour soi,
  • Le temps n’est pas compté,
  • On y trouve plaisir et épanouissement, …

Le métier signifie :

  • Cadre,
  • Salaire,
  • Temps défini,
  • Fiche de poste,
  • Compétences,
  • Vacances, …

En effet, si la passion prend le dessus sur le cadre que pose en théorie tout métier des risques vont apparaître :

  • une absence de limites en TEMPS : quand nous sommes passionnés, le temps n’est pas compté. Ainsi le métier passion peut prendre TROP de place dans sa vie, voire prendre toute la place entraînant un déséquilibre. Tout miser sur le métier passion est révélateur d’un surinvestissement qui, par le trop, cache en réalité un manque abyssal qu’on cherche à combler.
  • une absence de limites en SOI : le trop risque d’occuper tout l’espace concret mais aussi psychique, empêchant tout imprévu, tout élément perturbateur qui est aussi signe de vie de venir interroger, bousculer un édifice monobloc !

Dans les métiers les plus associés à la passion, métiers associés à des valeurs, à du sens, nous pouvons en explorer quelques-uns avec leur TROP :

  • Métiers du soin : investissement dans l’humain, dans le prendre soin qui implique des valeurs, de l’affectif, … Le trop va souvent être lié à des injonctions comme « fais plaisir », « les autres avant moi », « sois fort(e) », …
  • Métiers de l’enseignement : également investissement dans l’humain, dans l’accompagnement et le partage, où l’affectif est aussi très présent,… Le trop va par exemple se retrouver dans la recherche perpétuelle d’informations, de données utiles pour améliorer son enseignement, …
  • Métiers artistiques : partager ses tripes, ce qui nous traverse aux autres par un média particulier (écriture, corps, voix, créations, …). L’une des particularités du trop est pour beaucoup la précarité du statut d’intermittent avec la nécessité de gérer au delà de l’artistique tout le côté administratif (appel à projets, gestion d’une compagnie, chargé de diffusion, communication, …)

Comment poser ses limites dans un métier passion ?

1.   Poser concrètement un cadre « travail »

  • En s’imposant un cadre horaire : des horaires de travail le plus fixe possible : par exemple 3h le matin, une pause d’une heure pour manger et décompresser et 6h de travail : cela fait déjà sur une semaine de 5 jours 45h de travail par semaine. Suivant vos contraintes professionnelles, aller au-delà de 10h de travail par jour doit vous interroger !! Être disponible tout le temps n’est pas humain.
  • Quand on est dans un métier passion où on travaille seul un cadre géographique est essentiel : dédier un espace de travail clair (même s’il s’agit juste d’un espace bureau); savoir utiliser des espaces partagées avec d’autres (permet aussi de partager les soucis du quotidien, de ne pas se sentir seul(e), d’échanger des idées et des solutions). Sortir pour travailler dans un espace public (médiathèque, cafés, espace de coworking, peut faciliter la séparation entre les espaces de vie privée et de travail)
  • Des temps de déconnection du téléphone, des courriels et visios : Le droit à la déconnection est dans le droit du travail !! C’est même un devoir vis-à-vis de soi. = je coupe mon téléphone quand je fais mes pauses repas et quand je ne travaille pas ; je ne rouvre pas mon ordinateur hors temps de travail pour faire du travail.
  • Conservez un temps de repos hebdomadaire (=Week-end) même si c’est en pleine semaine car vous êtes occupé par votre travail les fins de semaine !!
  • Conservez des vacances régulières. Faire certains métiers passions peut être perçu par les personnes extérieures comme du non travail (par exemple un comédien dira « d’ailleurs on joue !! »), pourtant c’est bien un travail et avec des horaires extensibles !!! 

2.   Se ressourcer

Être passionné(e), c’est avoir besoin d’explorer sa passion, de mener des projets en lien avec sa passion. Or, souvent, le travail laisse peu de place en temps pour continuer à enrichir et explorer votre passion. Il est donc vital pour vous de poser dans votre agenda au minimum deux plages horaires de 3 heures chacune par exemple par semaine pour travailler sur vos projets, vous ressourcer « dans » votre passion. C’est ce qu’à la suite de Stephen Covey, j’appelle le cadre 2, celui de ce qui est important mais non urgent. Il passe souvent aux oubliettes car il faut gérer le cadre 1 ce qui est important et urgent comme les factures, le cadre 3 ce qui est non important mais urgent comme les courriels dont nous sommes de plus en plus envahi(e)s et le cadre 4 qui est ce qui ni important ni urgent la futilité, la procrastination pure qui a néanmoins son utilité et a sa petite et juste place à trouver.

3.   Accéder à ses besoins et les respecter

Les personnes passionnées ont souvent du mal à poser des limites. Voici quelques astuces pour vous aider.

Arriver à poser ses limites demande un travail sur soi et une conscience de son mode de fonctionnement.

Poser ses limites, c’est se respecter soi-même, respecter ses besoins. Encore faut-il avoir conscience de ses besoins.

Quand nous parlons des besoins, nous évoquons des dimensions non négociables, indispensables pour vivre. Les besoins sont différents des désirs et des envies.

Nous pouvons avoir envie de boire du champagne et accepter de nous rabattre sur une autre boisson. Mais nous ne pouvons pas ne pas répondre à notre besoin de boire, sinon nous mourrons. Si, parmi tous les besoins ci-dessous, certains sont trop carencés, nous pouvons mourir.

Cela est évident pour les besoins physiologiques. Mais c’est aussi le cas pour les besoins psychologiques. Je vous renvoie à ses enfants orphelins après la seconde guerre mondiale dans un pays de l’Est d’Europe qui étaient juste nourris, changés qui se sont tous laissés mourir car ils ne recevaient aucune affection.    

Le schéma indique aussi comment le manque des besoins se manifestent dans le corps. Il est donc nécessaire d’écouter les messages de son corps pour repérer ses besoins en carence.

Notons également que suivant notre histoire de vie, certains besoins seront plus en demande que d’autres. Nous pouvons avoir besoin plus de sécurité que de besoin de reconnaissance par exemple, …

Le point 4 suivant vous donne des outils pour faciliter l’écoute des messages de votre corps : douleurs, émotions et donc besoins.

4.   Ecouter son corps = écouter ses ressentis, ses besoins, ses émotions pour être au diapason de ses besoins réels et donc pouvoir prendre soin de soi et poser des limites justes.

La météo intérieure : (prendre conscience que notre état intérieur change constamment et que c’est normal)

                Choisissez le nombre qui vous vient sur une échelle de 1 à 10.

1 étant le niveau le plus bas et 10 le niveau le plus haut.

Puis associer ce nombre à un mot qui colore l’état intérieur du moment. Cela peut être une sensation, un ressenti, une émotion, un symbole, une couleur.

L’observation de soi : (prendre conscience et écouter les messages de son corps)

S’installer assis sur une chaise (pieds au sol, angle droit entre jambes et cuisses, dos droit, pas appuyé sur le dossier de la chaise, épaules détendues, tête droite)

Fermez les yeux et observez ce qui est présent en vous comme si vous vous observiez avec une caméra : la caméra capte ce qui est dans son champ de façon neutre, sans porter de jugement et en même temps, elle est complètement câblée avec l’ensemble de vos ressentis. Observez sans jugement ce qui est là en étant complètement connecté à ce que vous ressentez en vous.

Vous pouvez observer votre respiration (cf ci-dessous), vos sensations (tensions musculaires, picotements, zone de chaleur ou de froid, …), vos émotions, les pensées, les sons (extérieurs et intérieurs), …

La respiration :

Observez sans la transformer votre respiration : comment votre respiration agit sur votre corps à l’inspiration, à l’expiration. Observez sans juger, que votre respiration soit lente, rapide, saccadée, …

Puis agissez sur votre respiration en inspirant par le nez (le ventre se gonfle/ je viens nourrir toutes les cellules de mon corps) et en expirant en soufflant par la bouche comme si je soufflais dans une paille (le ventre se vide/ j’expulse toutes les toxines du corps mais aussi le stress, les soucis, …)

Puis, je rallonge petit à petit l’inspiration… et l’expiration…

Enfin, je laisse ma respiration reprendre son rythme

Voilà quelques pistes à explorer !

La Chrysalide ou l’étape de la lente reconstruction

C’est en échangeant avec un groupe que j’accompagne dans le cadre d’un parcours de six mois pour des personnes en épuisement professionnel sévère avec la CPAM et la CARSAT que j’ai développé cette symbolique que je vous partage ici et qui parlera à toute personne en situation de réel épuisement professionnel.

Quand le mental est rattrapé par le corps, que le corps dit STOP !!

Qu’il vous retient au lit, incapable de vous lever ; qu’il fait que c’est le vide devant votre écran d’ordinateur ; que vos nerfs lâchent ; qu’une crise d’angoisse, de tétanie vous terrasse en plein travail ; que vous n’y arrivez plus ; que votre travail a perdu son sens ; que la fatigue a pris toute la place et que vous tombez, …

Vous êtes extirpé alors du monde accéléré et effréné du travail !! Vous ne vous reconnaissez plus, vous qui ne vous êtes jamais arrêté, vous véritable bête de travail, perfectionniste, soutenant inlassablement vos collaborateurs et l’entreprise à laquelle vous avez tout donné !!

Maintenant, vous n’avez même plus la force de faire une tâche simple sans ressentir une fatigue immense !! Vous êtes une autre personne. Sans savoir si vous allez pouvoir retrouver la personne que vous étiez.

Vous vivez l’étape de la chrysalide, celle qui fait le trait d‘union entre l’état de chenille et celui de papillon.

Quand la chenille se retrouve dans la chrysalide, le temps semble s’arrêter de l’extérieur : on ne voit rien se passer !!

Et pourtant, c’est une véritable mutation, transmutation même qui s’opère de l’intérieur et qui nécessite ce temps long mystérieux et essentiel pour que surgisse un autre, le papillon.

Le saviez-vous : la chenille dans la chrysalide se décompose complètement, elle mute en une « pâte » qui va ensuite se recomposer totalement. Ce ne sont pas seulement des ailes qui vont pousser, le corps tout entier est « reconstruit », remodelé.

C’est exactement la même chose qui advient pour la personne en épuisement professionnel. Comme la chenille, peut-être, elle ignore tout de son devenir. La chenille s’imagine-t-elle devenir un être volant ?  Elle qui a rampé sur le sol, le long des branches sur un support terrien. Elle ignore tout de sa future vie. Que va-t-il rester de la chenille après sa transmutation ? Se pose-t-elle des questions ? Nous l’ignorons.

En tout cas, nous humains, nous nous en posons pleins des questions et en particulier quand l’avenir est incertain, inconnu : Serais-je capable de reprendre mon ancienne vie professionnelle ? Tout semble me dire le contraire. Serais-je même capable de revenir dans le monde du travail ? Je n’ai plus d’énergie, comment en trouverais-je encore ? Le temps passe et je vais devoir y retourner mais est-ce possible ? Vais-je tenir ? Mon corps le peut-il encore ? …

Vous êtes en arrêt avec la nécessité de prendre soin de vous, mais vous n’arrivez pas à vous centrer sur le seul besoin de prendre soin de vous maintenant. Vous êtes happé par l’à venir !! Cela vous « pompe » littéralement de l’énergie que vous n’avez déjà plus.

Il est nécessaire de laisser le processus suivre son cours. La chenille ne peut pas devenir papillon du jour au lendemain. Elle ne peut pas faire l’économie de ce long passage dans la chrysalide.

C’est la même obligation qui vous est imposée, nécessaire et vitale. Durant le temps de la chrysalide, la chenille, qui n’est plus vraiment chenille et pas encore papillon, ne peut se projeter dans l’apprentissage des airs.

La chrysalide doit se consacrer à sa lente transmutation, laisser le temps faire son œuvre pour que le futur papillon se constitue dans le respect des lois internes de la transmutation biologique.

Vous aussi, il vous faut lâcher votre projection dans un futur qui demeure inconnu pour l’instant. Qu’allez-vous devenir ? Nul ne le sait encore. Allez-vous changer de métier ? Faire un bilan de compétences ? Faire une formation pour exercer un nouveau métier ? Vous reconvertir ? Cela crée beaucoup d’inquiétudes, d’angoisses qui sont énergivores et puisent dans le peu d’énergie qui vous restent.

Or, cette énergie vous en avez besoin pour vous reconstruire, pour prendre soin de vous, comme la chrysalide a besoin de toute la patience et de l’énergie centrées sur la « construction » de ce nouvel être en devenir !!

Cette transmutation de la chrysalide est mystérieuse, elle se passe à l’intérieur du cocon, à l’abri des regards ; tout comme votre transmutation qui demande de saisir ce qui s’est passé dans le travail, ce qui dans le système travail vous a abîmé, en quoi vous n’avez pas su dire stop, poser des limites, sortir de vos croyances que vous alliez faire plus que ce qu’un humain peut faire, sortir de loyautés toxiques qui vous ont enchaîné au travail et éloigné de ce qui est vital et essentiel pour vous.

Il faut laisser le temps au temps : le temps à votre chrysalide de vous coconner pour recharger vos batteries, pour retrouver une vision renouvelée de ce qui fait sens pour vous dans le travail et dans votre vie personnelle tout autant.

Comme la chenille qui ignore qu’elle va changer d’univers en passant de l’univers terrestre à celui céleste des airs, vous ignorez où vous allez vous épanouir, autrement, dans le monde du travail, après vous être reconstruit(e). 

Vous êtes dans la chrysalide et il vous est impossible, impensable de vous imaginer où sera votre à venir. La chenille ne peut pas croire qu’elle va changer radicalement d’univers. Vous non plus !!

Acceptez de prendre le temps de vous reconstruire. Ne vous battez pas contre le temps. Car « le temps ne respecte pas ce qui se fait sans lui » comme le dit Paul Morand déjà en 1941 dans l’homme pressé.

Acceptez cette chrysalide, ce cocon bienveillant qui vous protège pour vous aider à vous reconstruire. Les psychiatres, psychologues et médecins qui accompagnent savent au combien le corps a besoin de se reconstruire à son rythme.

Vivez la nécessaire chrysalide. Vous faites parti de celles et ceux qui ne se sont jamais arrêté, qui ont foncé sans compter pendant des années, en cumulant plus que votre poste, en tenant pour vos équipes. Vous qui vivez un réel épuisement professionnel, vous n’avez rien à prouver aux autres. Vous n’êtes pas de celles et ceux qui en font le minimum et qui ne risquent en rien d’être épuisé par le travail.

La santé mentale et la santé physique, deux faces d’une même pièce !

Posons le décor : Nous parlons aujourd’hui de plus en plus de la santé mentale.

« En 2019, l’OMS a lancé l’Initiative spéciale pour la santé mentale (2019-2023) : une couverture sanitaire universelle pour la santé mentale, afin d’assurer à 100 millions de personnes supplémentaires un accès à des soins mentaux de qualité et abordables dans 12 pays prioritaires. »

Il s’agit aussi de déstigmatiser la vision de ce que recouvre la santé mentale. Tout cela est une bonne chose. En effet, pour beaucoup de personnes la santé mentale demeure encore une vision réduite à des stéréotypes autour de termes comme la folie, les aliénés, les fous, …

Mais déjà, quand nous parlons santé mentale, de quoi parlons-nous? Voici la définition de l’OMS :

la santé mentale est un « état de bien-être qui permet à chacun de réaliser son potentiel, de faire face aux difficultés normales de la vie, de travailler avec succès et de manière productive, et d’être en mesure d’apporter une contribution à la communauté ».

Nous pouvons mesurer que nous sommes toutes et tous concerné(e)s par cette définition.

Sur un autre plan, la santé physique, nous voyons bien de quoi il s’agit autour de l’ensemble du champ médical du médecin traitant au chirurgien.

Depuis les Lumières jusqu’à aujourd’hui, chaque discipline scientifique s’est de plus en plus sectorisée, spécialisée amenant de facto à approcher l’humain par segments, par fragments.

C’est peut-être un peu caricatural, mais pas tant que cela.

Mon propos est de remettre en valeur l’unité de l’individu. Certes, il est composé de multiples dimensions, appartenances, interdépendances qui font d’un individu un système.

Et comme tout système, quand on agit sur un de ses éléments, tout le système est amené à se réajuster pour retrouver une forme d’homéostasie, d’équilibre interne pour que le système puisse fonctionner correctement.

En cela, rien de révolutionnaire. Nous le savons tous et toutes, par expérience, qu’agir sur la santé physique agit par ricochet sur sa santé mentale et inversement agir sur sa santé mentale agit sur sa santé physique.

De plus en plus de professionnels de la santé prennent en compte cela. Néanmoins, il reste encore beaucoup à faire pour créer des ponts, des liens entre les champs de la santé physique et de la santé mentale. Les dernières conférences de Doctolib dans le cadre des semaines sur la santé mentale ont très bien montré cet enjeu.

Décloisonner, échanger, partager, coopérer, collaborer sont des maîtres mots pour l’avenir d’une santé globale.

Nous pouvons à notre mesure, chacun et chacune le mettre en œuvre à notre échelle et déjà en tout premier lieu pour nous-même, pour notre propre santé.

Comment protégeons-nous notre santé globale dans notre vie professionnelle, dans notre vie privée, amicale, sociale, …?

Dans notre vie professionnelle, laissons-nous la souffrance physique et psychique nous atteindre? Posons-nous des justes limites ? Le système travail encourage le toujours plus, la surcharge avec de moins en moins de personnels. Si nous ne posons pas nos limites, si les valeurs de l’entreprise ne correspondent plus à nos valeurs, si le respect de ses besoins ne sont pas respectés, si les relations professionnelles sont dégradées, si le management est toxique, si la charge de travail dépasse les horaires prévus, si les tâches débordent et vont au-delà de sa fiche de poste, si on tient pour son équipe, ….. dans tous ces cas, nous n’écoutons plus notre corps qui dit « stop » par des douleurs, du stress constant, des symptômes corporels, une fatigue qui s’accumule, un sommeil non réparateur, une irritabilité et une sensibilité qui surgissent de plus en plus. Par conséquent, nous fonctionnons comme si nous n’étions qu’une tête sans corps, le corps étant réduit à une machine qui doit suivre le diktat de la tête. Notre système est alors dysfonctionnel et notre corps finira par avoir le dernier mot et nous arrêter malgré nous.

Dans notre vie privée, si déjà nous en avons une, gardons-nous du temps pour nous-même, pour nous ressourcer par des activités qui ont du sens pour nous? Sommes-nous surchargés parce que nous sommes une femme et qu’en plus du travail, il faut gérer la maison, les enfants ? Et même si les tâches sont réparties dans le couple, s’il y en a un, y a t-il un temps pour le couple, pour chacune et chacune? Si la vie, c’est métro-boulot-dodo, quelle place pour le plaisir, la réalisation de soi qui fait partie de nos besoins vitaux? Si mon métier est essentiellement physique, quelle place au mental, à la découverte, à la culture? Si mon métier est mental, quelle place au physique, au corps?

Est-ce que dans notre vie, il y a une place pour la vie amicale, sociale, associative, politique qui viennent combler nos besoins d’appartenance, de reconnaissance, de liens avec les autres, de partage? Partager des activités physiques, intellectuelles, culturelles, sportives, festives, autant d’activités qui donnent sens, qui créent du lien, du soutien, de l’entraide pour faire face aux difficultés de la vie.

Et tout simplement, quand nous oublions le corps, pourquoi ne pas aller marcher dans un environnement différent de mon quotidien, aller au bord d’une rivière, dans un bois pour retrouver un peu de nos racines, nous qui sommes un mammifère parmi d’autres. Nous relier à un système dont nous dépendons et qui est encore plus vaste que notre vision réductrice de l’humain. Mais cela est encore un autre vaste sujet.

La Qualité de Vie et Conditions de Travail, un investissement

Nous avons pu voir dans les articles précédents combien la qualité de vie et conditions de travail doit être mise au cœur de l’entreprise. Vouloir mettre en place une Qualité de Vie au Travail dans son entreprise demande un investissement, des moyens.

Nous avons relevé les différents axes qui devaient être passés au crible de la QVCT, que ce soit les valeurs, les enjeux et la finalité de l’entreprise; que ce soit l’organisation structurelle, managériale; que ce soit les modes de communication et de relations.

Pour réaliser pleinement ce challenge, des moyens doivent être investis dans trois champs : des moyens financiers, des moyens en temps et des moyens humains.

Des moyens financiers :

Repenser autrement l’entreprise demande d’investir en priorité dans la formation de ses équipes à travailler autrement. C’est un investissement dans le sens que cela va engendrer des bénéfices in fine pour l’entreprise qui retrouvera une dynamique saine et permettra de faire des profits en éliminant des pertes dues à une mauvaise organisation, à des relations dégradées,…

Cet investissement est faible compte tenu des bénéfices à long terme. Si nous faisons une comparaison, cet investissement serait l’équivalent d’un « check-up » qui fait l’analyse de tous les problèmes de santé, plus la remise en forme et la prévention pour éviter que d’autres maladies surgissent. La QVCT englobe à la fois la réparation et la prévention.

Des moyens en temps :

C’est un point qui est le plus difficile à concéder pour les entreprises. Nous sommes dans un monde qui coure après le temps et accepter de prendre du temps pour en gagner n’est pas chose aisée.

Mais il est impossible de faire du bon travail sans prendre le temps de poser le diagnostic de l’entreprise, sans prendre le temps d’écouter les avis de tous, sans prendre le temps de former à une nouvelle façon de fonctionner, car cela ne se décrète pas. Changer ses habitudes sans prendre le temps d’expliquer, de rassurer les inquiétudes, sans peser les freins qui s’y opposent, sans accompagner les personnes est un leurre et mène tout droit dans le mur.

C’est aussi d’inscrire des temps d’échange, de concertation entre les équipes qui feront gagner énormément de temps ensuite dans la gestion courante. Certaines entreprises ont par exemple banalisées une demi-journée qui inclue de la concertation, du brainstorming et des travaux de groupe autour de commissions thématiques. Il ressort des solutions et des idées nouvelles pour améliorer le fonctionnement et la gestion de l’entreprise comme de sa communication. Il s’agit de sortir de sa zone de confort. C’est le défi lancé à toute entreprise qui veut rester ancrée dans la réalité et dans l’économie.

Supprimer les évaluations individuelles pour les remplacer par du collectif est une solution payante comme l’a valorisé Laurence Vanhée, fondatrice des happiness officer.

Des moyens humains :

Ils sont liés pour une part aux moyens en temps comme par exemple donner aux équipes le temps de se concerter, d’élaborer à l’image de l’exemple donné ci-dessus.

Mais c’est aussi libérer certaines personnes d’autres tâches ou de les alléger pour que ces personnes se consacrent au suivi de la mise en place des moyens pour la bonne qualité de vie de l’entreprise. Il n’y a pas de secret. Si la QVCT n’est pas une priorité pour l’entreprise, qu’elle ne s’attende pas à des miracles.

Si les priorités ne sont posées au bon endroit, les résultats ne seront pas possibles. Et la priorité des priorités, c’est la Qualité de Vie au Travail. car c’est d’elle que dépend toute la vitalité et la croissance de l’entreprise. Toute qualité de vie au travail dégradée par une mauvaise gestion, une organisation hasardeuse, des relations défectueuses, un management inhumain entraînera de facto des pertes pour l’entreprise, de l’absentéisme à des pertes au niveau des bénéfices en passant par un turnover important. La stabilité d’une entreprise est un réel travail. Ce travail peut être soutenu par l’investissement de la QVCT. Nous le savons tous qu’il faut peu de choses pour mettre à mal une entreprise sans qu’il y est de surcroît des questions liées à l’économie globale. Or, nous sommes dans un contexte où l’économie est fragilisée pour un temps long et qu’elle est en pleine mutation compte tenu des enjeux globaux qui sont vitaux pour la planète. C’est une raison supplémentaire pour assurer la pérennité de son entreprise en la fondant sur des bases solides.

Choisir la QVCT comme un atout et un allié, c’est faire le pari du présent et de l’avenir de son entreprise.

La QVCT de l’entreprise transparaît dans sa communication et ses relations

La QVCT est le plus souvent associée à la qualité de la communication et des relations car c’est la partie visible de l’iceberg. Cependant, cette partie visible n’est féconde que si et seulement si les autres axes développés dans les articles précédents sont mis en œuvre. En effet, la communication et les relations sont le reflet de comment l’entreprise est structurée, de comment elle met en œuvre ses valeurs, de comment elle s’organise. C’est également dépendant des moyens que nous verrons dans un article ultérieur.

La plupart du temps, la qualité de vie au travail est réduite au champ de la communication et des relations. C’est comme marcher sur la tête et vouloir commencer par la fin. Certes, cela peut faciliter, améliorer un peu le système mais laisser de côté les autres champs préfigure la fragilité et les gains éphémères de cette démarche.

Donc oui, la QVCT va améliorer la communication et les relations, mais elle doit être coordonnée à une réelle volonté de changer structurellement dans sa façon de fonctionner, de manager, de s’organiser…

La communication et les relations doivent s’appuyer sur des bases neuves, saines et solides pour être vecteurs de qualité de vie au travail.

De fait, si les relations dans l’entreprise sont marqués par une hiérarchisation tranchée, les relations sont entachées de jeux de pouvoir qui vont fausser la bonne marche de l’entreprise. Nous sommes tellement habitués à ce système qu’il es difficile, voire impensable pour beaucoup de faire autrement. Si les fondations sont mauvaises et malsaines, le reste de la construction ne peut être que fragile !

Seule la sortie de la concurrence et des jeux de pouvoir pour fonder les relations sur une saine collaboration et coopération peut permettre de nouvelles façons de construire une entreprise dynamique et performante. Si chacun se méfie de son voisin et ne travaille que pour son objectif de carrière, les autres sont forcément des freins et non des alliés. Il n’y a pas mieux pour ralentir l’essor de l’entreprise, même si l’on a longtemps cru que la mise en concurrence au sein de l’entreprise lui était bénéfique. Pour une part peut-être, mais avec beaucoup de dégâts collatéraux qui retombent in fine sur l’entreprise.

C’est la façon de travailler, de collaborer ensemble qui doit être au cœur. Une vision en « co » : en co-construction, en co-opération, en co-llaboration qui est à mettre en action.

C’est donc une révolution au niveau managériale qui est à réaliser. Les managers ne doivent plus être des personnes coincées entre les employés et le patron, ne plus être de simples donneurs d’ordre. C’est une responsabilité partagée qui est à mettre en place. Et des récompenses tout autant partagées.

Cela suppose de prendre l’humain beaucoup plus en considération,de mettre en valeur le travail accompli, de savoir remercier et valoriser les réussites de tout un chacun. Au lieu d’être dans le « on peut toujours mieux faire », être dans le « c’est super ce que tu as fait; merci pour ton implication; bravo pour avoir réussi à trouver une solution;… » Avoir de la sollicitude pour ceux qui font vivre l’entreprise est vital ! L’homme n’est pas une machine, ni une simple force de travail dont on reconnaît le travail uniquement par le salaire. Bien plus que le salaire, chacun attend une reconnaissance, quelque chose qui donne de la valeur au travail effectué.

Tout cela pour pointer le fait central qu’il s’agit de remettre des valeurs humaines fortes au centre de l’entreprise. Chaque individu qui arrive le matin au travail n’est pas un terreau vierge qui met sa vie au placard pendant le temps de travail. Prendre en considération ce qui se joue dans sa vie personnelle, ne serait ce que par l’intérêt de savoir comment il va est essentiel. C’est du bon sens, me direz-vous. Mais concrètement, quelle place donnons-nous à l’écoute de l’autre au sein du travail. Il ne s’agit évidemment pas de devenir le café du commerce du coin !

L’entreprise est un système où chaque rouage a son importance et utilité. Valoriser l’utilité de chacun de ses rouages est un gage de réussite pour l’ensemble.

Si chacun est valorisé, il sera en capacité de donner le meilleur de lui-même pour faire vivre le tout, l’entreprise qui sans tous ses rouages est une coquille vide.

Evidemment, cela n’empêche pas de travailler à de meilleures relations humaines. Tout rassemblement de personnes autour d’un même lieu et projet suppose la gestion des individualités et personnalités qui ont à cohabiter ensemble. Mais si les bases que nous avons posé sont saines, il sera plus facile de déminer les autres conflits qui peuvent surgir entre des acteurs de l’entreprise. Si les bases sont malsaines, les conflits seront larvés par d’autres composantes professionnelles comme les jeux de pouvoir et de concurrence.

Ainsi, si les bases sont bien posées, il est alors possible de travailler à une meilleure communication et de meilleures relations en s’appuyant sur la communication non violente, en intégrant l’émotionnel dans le monde du travail, mais également l’assertivité, la capacité à poser de saines limites,…

Il est certes complexe de gérer un groupe d’humains car de nombreux enjeux sont présents dans ce contexte. C’est une raison supplémentaire pour se donner les meilleures conditions en posant des bases saines. Les confrontations sont inévitables. Une entreprise qui se targuerait d’aucune difficulté en interne serait une entreprise mensongère. Si aucune difficulté ne surgit, c’est que celles-ci sont étouffées, niées et c’est encore plus dangereux car le feu couve et l’implosion n’en sera que plus importante.

N’ayons pas peur des désaccords et confrontations qui peuvent être source de maturation et d’évolution de l’entreprise mais crevons l’aspect des conflits qui paralysent le bon fonctionnement et la vie de l’entreprise.

C’est là de nouveau que l’entreprise doit accepter d’être aidée, accompagnée avec un regard extérieur pour assainir et faire grandir l’entreprise qui comme un humain passe par des crises au cours de son existence.

La QVCT doit agir dans le maillage organisationnel

Nous avons pu saisir dans les autres articles la place centrale que doit occuper la qualité de vie au travail. Si l’entreprise met en périphérie la QVCT, elle peut être sûre d’aller au devant de difficultés récurrentes et pérennes.

Il est donc vital que la QVCT agisse dans le maillage organisationnel. L’organisation reflète la réalité et la vitalité de l’entreprise. Le mode d’organisation permet de vérifier si l’entreprise est en phase avec ses valeurs, sa finalité. L’organisation est aussi le vecteur de la manière de communiquer et d’être en relation et c’est aussi celle qui permet de rendre possible les moyens à mettre en œuvre pour une vie saine de l’entreprise. Nous verrons ces deux points dans deux autres articles.

Parler de maillage pour l’organisation vise à appuyer le fait que tout est imbriqué, lié et que chaque élément a son importance et se doit d’être pris en compte. En effet, tout élément qui dysfonctionne dans un système entraîne des répercussions sur l’ensemble du système.

1. Parler d’organisation, c’est parler de structure, de hiérarchie :

J’ai déjà un peu évoqué ce point dans l’article « la QVCT s’enracine sur les valeurs de l’entreprise ». La plupart de nos entreprises sont encore dépendantes et accrochées à une structure hiérarchique pyramidale qui déresponsabilise, démotive et ralentit la croissance même de l’entreprise. Certes, il n’est pas aisé de changer de modèle et tous les acteurs concernés freinent ce changement, y compris celles et ceux qui en subissent le plus les conséquences. La force des habitudes fait que nous préférons garder un système que nous savons usés mais que nous connaissons, c’est rassurant à court terme mais cela impose l’immobilisme à long terme !!

Il est essentiel de réduire le nombre de niveaux hiérarchiques d’une part pour faciliter les échanges de données et solutions, pour rendre plus autonome chaque poste de travail, garant d’une meilleure souplesse et résolution des problèmes. D’autre part, diminuer le nombre de niveaux hiérarchiques rend plus responsable tout un chacun et augmente la motivation intrinsèque et la collaboration par son travail à la réussite de l’entreprise à laquelle on appartient. C’est intégrer la confiance couplée à la responsabilisation.

2. Parler d’organisation, c’est parler de management, de responsabilité :

Le premier point entraîne de facto un changement de management à visée plus collaborative, plus bienveillante. C’est entrer de plein pied dans du gagnant-gagnant. Evidemment, ce changement ne se décrète pas, il doit être préparé, accompagné à tous les niveaux de la structure. Sortir de rapports de hiérarchie et donc de pouvoirs demande à établir une confiance renouvelée, bâtie sur la compréhension que chacune et chacun a sa place, ses compétences à partager. Il s’agit de sortir de la concurrence et de la jalousie pour entrer dans la collaboration, la coopération et l’entraide. C’est saisir qu’on est ensemble dans le même bateau et qu’un mousse est tout autant utile que le capitaine. Sans mousse, les ordres du capitaine seraient vains. De même, si le capitaine ne sait pas écouter les messages des mousses qui sont là où le capitaine n’est pas, le bateau peut courir de graves dangers. Même si la comparaison vaut ce qu’elle vaut, elle vise à ramener du bon sens dans la gouvernance du bateau entreprise. La confiance mutuelle est gage de qualité et un atout de solidité de l’entreprise. Pour ne citer qu’un simple exemple, dans une usine qui fabrique du matériel de bricolage, le vol de matériel a considérablement diminué quand celle-ci est passé du contrôle des employés à la permission donné aux employés de prendre ce qu’ils avaient besoin pour eux personnellement. Des employés écoutés, motivés, participants à la collaboration et au bon fonctionnement de l’entreprise font de cette dernière une entreprise saine avec une bonne qualité de vie au travail.

3. Parler d’organisation, c’est parler de conditions de travail :

Les deux points précédents vont passer de la théorie à la pratique en se concrétisant dans le large champ des conditions de travail. Cela rejoint la question des moyens que l’entreprise met en oeuvre pour une meilleure qualité de vie au travail. Nous le développerons plus largement dans un autre article.

Les conditions matérielles de travail reflètent la façon dont le dirigeant considère ses employés. D’ailleurs, le C a été rajouté à ce qui se nommait avant QVT. Cela montre l’importance des conditions de travail. Cela va de la question de l’ergonomie, de l’adaptation des postes de travail à la fois pour faciliter et rendre efficace le travail mais aussi l’adaptation à la personne spécifique qui peut avoir des besoins particuliers pour être dans de bonnes conditions physiques et psychiques de travail. L’environnement de travail est plus important que nous l’estimons. Et c’est en concertation avec les usagers que les meilleures solutions peuvent être trouvées et souvent sans forcément grand frais. Le gain est bien au-delà des coûts d’aménagement. Mais comme toujours, les mentalités poussent à penser que c’est secondaire et n’a pas de rapport avec les objectifs de rentabilité. Ce qui est une grossière erreur. Tout ce qui participe de près ou de loin à la démotivation, au désengagement des salariés ralentit la croissance de l’entreprise, joue sur l’absentéisme…

La gestion du temps est un sujet central. Nous avons perdu pour la plupart le bon sens de remettre au lendemain ce qui ne peut être fait le jour même, la surcharge de travail crée du stress qui engendre moins d’efficacité, moins de performance et plus de temps pour faire encore plus… Cercle vicieux du hamster dans sa roue, qui plus il court, plus la roue tourne vite jusqu’à atteindre le burnout !! La juste mesure est à retrouver, nous ne sommes pas des ordinateurs, même si eux aussi finissent par chauffer et fatiguer d’une certaine façon ! Nous ne sommes pas des machines et notre corps, ainsi que notre psychisme ont besoin de repos pour se reconstituer. L’équilibre entre le temps de travail et de repos a disjoncté !! La période de confinement et celle du déconfinement n’a pas fait que mettre un peu plus en exergue le problème de sommeil. Le sommeil est une phase essentielle pour se reconstituer et manquer de sommeil, c’est courir tout droit vers un épuisement professionnel.

Attention, chacun n’a pas les mêmes besoins. Il nous faut sortir de l’idée qu’une nuit de sommeil parfaite correspond à 8 heures de sommeil consécutifs. Le fait de se réveiller est bien plus fréquent qu’on ne le dit et la quantité de sommeil ne doit pas non plus se condenser uniquement la nuit. Des phases de repos en journée sont essentielles. Nous savons grâce aux neurosciences que nous ne pouvons pas demeurer concentré plus de vingt minutes environ. La méthode pomodoro visant à se concentrer sur un sujet pendant vingt minutes suivi de cinq minutes de pause est un bon exemple d’une autre façon de faire. La sieste, si mal vu, est un bon moyen de se régénérer en journée pour une meilleure efficacité qu’un long temps de latence après le repas durant la phase de digestion !

Être rentable, efficace ne signifie pas, travailler sans pause, avec des horaires extensibles à souhait. Les jeunes générations ont d’ailleurs le désir de sortir des horaires classiques de bureau pour appréhender des horaires plus décalées et plus souples. Le télétravail peut être un avantage dans ce domaine. Mais il a aussi son revers de médaille avec l’impression de devoir être disponible à tout moment. Cela implique aussi la difficulté de gérer en télétravail les deux sphères sur le même lieu et temps. cela es d’autant plus vrai pour les femmes qui ont fait le plus de frais de surcharge durant la période récente de confinement.

Tout cela montre la nécessité de cadrer le temps de travail, de gérer ensemble de nouvelles façons de travailler tout à la fois pour être efficace et bien dans son corps et dans sa tête.

Ce n’est pas sur le coin d’une table entre deux portes que peuvent se décider tous ces changements. La prise en compte de la qualité de Vie au travail demande un investissement réel et une prise à bras le corps des enjeux d’une entreprise saine et vivable.

Recherches utilisées pour trouver cet article:https://cgformationcoaching com/la-qvt-doit-agir-dans-le-maillage-organisationnelle/

La QVCT s’enracine sur les valeurs de l’entreprise

La Qualité de Vie et conditions de travail se doit d’être au cœur de l’entreprise. Pour être efficace, il est nécessaire qu’elle s’appuie sur les valeurs qui fondent l’entreprise, sa finalité, l’essence même de son existence.

Cela peut sembler évident mais les évidences sont souvent vite oubliées « quand nous avons le nez dans le guidon ».

Toute entreprise a été créée dans le but de rendre un service ou de vendre un produit. Le choix du service ou du produit a son histoire qui a donné sens à la création de l’entreprise. Souvent des valeurs sont associées à ce choix. Même s’il ne s’agit pas de rester figé dans la vision originelle de l’entreprise, l’entreprise se doit de garder l’essence de sa création. Ou si des changements de valeurs sont à opérer, elles sont à réfléchir et ancrer dans la vie de l’entreprise.

En quoi la QVCT s’enracine dans les valeurs de l’entreprise, dans sa finalité, son essence?

Le fait « travail » ne doit pas se limiter à un vision purement utilitariste et matérielle comme moyen de se nourrir, se loger, payer ses factures. Même si cela n’est pas négligeable, loin s’en faut, tout un chacun préfère faire un travail qui participe à un sens, à des valeurs que nous portons. Être en adéquation avec les valeurs, la finalité et l’essence de l’entreprise est essentiel pour être bien, performant dans son travail. Cela rejoint la question de la motivation.

La motivation est un facteur essentiel dans la réussite d’une entreprise. La motivation extrinsèque est basée sur la récompense et sur ce qui vient de l’extérieur de soi. Elle renvoie dans le travail en premier lieu au salaire, aux primes. C’est une motivation conditionnée par ce que l’on reçoit. Elle est certes normale mais elle est souvent insuffisante à créer une motivation épanouissante.

Il faut compter sur la motivation intrinsèque qui vient de soi. Et c’est là qu’intervient l’importance de créer une synergie chez tous les employés pour les intégrer à la responsabilité de la vie de l’entreprise. Chaque salarié doit être amené à croire qu’il participe activement à l’essence et à la finalité de l’entreprise, qu’il est porteur des valeurs de cette dernière. Chaque salarié doit se sentir comme collaborateur, contributeur de la société où il travaille. Il en est une des preuves vivantes. C’est de cohésion qu’il s’agit.

Or, dans nos entreprises, nous sommes souvent loin de cette vision car le modèle hiérarchique pyramidale démotive, déresponsabilise et déshumanise la raison d’être de l’entreprise.

Concrètement, il ne s’agit pas de faire un beau discours, d’écrire de beaux statuts, de mettre en avant sur son site internet les valeurs portées par l’entreprise. Non, cela doit se traduire factuellement dans l’ensemble des rouages de l’entreprise : dans la façon de manager, d’organiser le travail, de partager le travail et d’impliquer tous les salariés dans la responsabilité, la réussite et les récompenses. Partager la responsabilité, c’est tenir compte des avis de tout un chacun, peu importe ses compétences, niveau d’études. Les exemples sont nombreux d’entreprise qui ont gagné en rentabilité en écoutant ses employés de terrain qui savent comment il est nécessaire d’améliorer la gestion du travail. C’est aussi faire participer tous les employés aux décisions et orientations de l’entreprise. C’est sortir du modèle patriarcal où le patron serait le protecteur qui décide pour le bien de ses employés. Ces réflexes ont la vie dure et sont loin d’être déracinés. Et il n’est pas aisé de changer des habitudes ancestrales pour casser les barrières de la pyramide hiérarchique qui déresponsabilise, permet de renvoyer la faute sur le patron du côté des salariés et du côté des dirigeants de rester dans l’idée que les salariés ne comprennent rien aux ficelles techniques de la finance ou des marchés… C’est volontairement caricatural ! Même si dans la réalité, c’est plus nuancé, on ne peut nier cette lutte sous-jacente des classes qui érode la bonne qualité de travail. Les a priori des uns et des autres, la jalousie sur les places et rôles des autres détériorent la possibilité et capacité que nous avons tous de collaborer et travailler en meilleure intelligence.

C’est en s’appuyant sur les valeurs de l’entreprise, en en faisant un bien commun qu’il est possible de dépasser ces frontières et de créer de nouvelles conditions de travail.

C’est un investissement qui peut faire peur mais qui est bien plus porteur que de rester dans ses vieilles habitudes. Créer cette synergie ancrée sur les valeurs de l’entreprise impliquant de nouvelles façons de s’organiser est gage de l’augmentation de la rentabilité, tant humaine que financière. Je renvoie de nouveau au livre de Jacques Lecomte Les entreprises humanistes pour n’en citer qu’un.

Il est clair que vouloir faire cette démarche, qui est un investissement pour le long terme, suppose d’être accompagné pour que l’ensemble des salariés puissent faire ce passage d’un modèle à un autre, car il s’agit bien ici de changer de modèle de management, de gouvernance et d’organisation.

Peu d’entreprises osent investir réellement cette véritable vision complète de la Qualité de Vie et Conditions de travail. Mais le jeu en vaut la chandelle !!

La QVCT est à l’entreprise ce que l’écologie est à la planète

Il est urgent de prendre au sérieux la Qualité de Vie et Conditions de Travail pour réparer le monde de l’entreprise, comme il est aussi vital de mettre l’écologie en action pour réparer notre planète.

Les vrais changements en profondeur sont toujours difficiles à opérer et l’humain a cette fâcheuse tendance à attendre d’être au pied du mur, quand il n’y a plus de fuite envisageable ou de déni possible.

Cela fait plus de trente ans que les scientifiques mettent en garde et appellent aux changements, mais nous demeurons dans du green waching !! Avoir une poubelle papier et une poubelle tout venant n’est plus suffisant !! Il en est de même pour la Qualité de Vie au Travail. Depuis aussi longtemps, nous savons que l’humain doit être remis au centre des entreprises, qu’un nouveau management plus collaboratif, plus bienveillant, plus horizontal est nécessaire. Qui plus est, le mettre en place entraîne une réelle rentabilité et efficacité. En sont témoins les nombreuses études, les livres et idées qui circulent. Mais nous ne faisons que constater l’immobilisme et le vernis de QVCT qui ne va pas plus loin que le green waching.

D’un côté la planète est détruite à grande vitesse sans que nous réagissions et de l’autre le burnout et l’épuisement professionnel sont des fléaux qui ne cessent de grossir sans que rien ne change.

Dans les deux cas, nous sommes en présence de la maladie de l’interaction, de l’interconnexion. Paradoxe d’un monde de plus en plus connecté pour au fond l’être de moins en moins. Cette hyper connexion est un leurre, un nuage de fumée sans consistance, sans vie !

Dans les deux cas, l’humain est en cause. Pour l’écologie, l’humain se croit au-dessus du lot, en droit de ne rendre des comptes à personne sur sa façon de prendre, consommer les ressources de la planète comme s’il en était propriétaire.

Pour la QVCT, l’humain est banni au bénéfice du profit, d’une économie qui devrait augmenter sans qu’elle soit critiquée ou remise à sa juste place au service de l’humain et non l’inverse.

Les deux sont liés mais dans un cas l’homme se croit le maître du monde, de la planète qui doit être son esclave. Et dans l’autre cas, l’humain devient son propre esclave, pris au piège de son désir de domination.

Tant que des valeurs humaines fortes ne seront pas remises au centre du système entreprise, l’homme continuera de s’écraser lui-même et mutuellement. De même que, tant que l’homme sera autocentré, pensant la planète comme un objet ou un ensemble d’objets libre service, la planète continuera à être détruite sans retour possible, ce qui est déjà de toute façon déjà le cas. Tous les scientifiques sont d’accord sur ce point.

Arrêtons de croire que la Qualité de Vie et Conditions de Travail est une simple obligation que l’on peut contenter et combler en installant une salle de repos, un baby-foot ou une heure de sport sur le lieu de travail. C’est se donner bonne conscience pour ne rien changer.

La Qualité de Vie et Conditions de Travail pour être effective suppose un réel travail de fond où sont posés sur table :

  • l’organisation matérielle, hiérarchique, temporelle, managériale,
  • les conditions de travail,
  • les valeurs de l’entreprise et les moyens pour les mettre en œuvre,
  • la communication interne, externe,
  • les modes de relations,
  • le retour au collectif et l’arrêt des évaluations individuelles qui sont une perte de temps et déshumanisantes,

La QVCT suppose tout autant la mise en place de nouvelles façons d’être au niveau :

  • management : de façon plus horizontale, plus collaborative et bienveillante,
  • responsabilité : plus partagée et coopérative,
  • relationnelle : plus respectueuse des besoins de chaque personne,
  • organisation : plus souple et moins pyramidale,
  • etc…

Il est urgent de réparer notre planète comme il l’est tout autant pour nos entreprises. Et au fond, l’un ne va pas sans l’autre. Et agir à la réparation de notre planète entraîne de facto à vivre autrement nos entreprises.

Chefs d’entreprise, managers saisissez-vous de cette opportunité ! C’est un investissement mais vous seuls pouvez vous y engager accompagnés dans cette transition par des femmes et des hommes qui sauront le faire humainement et professionnellement.

La QVCT, le cœur d’une entreprise saine !!

Il serait tant de prendre au sérieux la Qualité de Vie et Conditions de Travail. Je renvoie à l’article intitulé « la QVCT est à l’entreprise, ce que l’écologie est au monde. »

La QVCT est souvent réduite au bien-être des salariés, à un vernis qu’on vient poser pour faire genre qu’on est à la mode, qu’on prend soin du bien-être des salariés.

La qualité de vie que ce soit dans le travail ou ailleurs n’est pas un en soi. Elle est totalement rattachée, liée et dépendante de l’ensemble des rouages de l’entreprise pour la QVCT.

La qualité de vie renvoie non seulement aux qualités humaines mais présuppose la satisfaction des besoins des personnes impliquées.

La Qualité de Vie au Travail est en équilibre quand les besoins des salariés, des collaborateurs sont contentés tout autant que les besoins de l’entreprise, c’est-à-dire, les besoins liés aux objectifs de cette dernière.

Nous pourrions dire que la QVCT est l’harmonisation des besoins particuliers de chaque personne impliquée dans l’entreprise avec les besoins de l’entreprise.

Nous pourrions résumer les besoins de l’entreprise à :

  • Vendre ses produits ou services,
  • Être plus performante,
  • Se donner les moyens de réussir,
  • Avoir une organisation efficace,
  • Communiquer ses valeurs, ses messages,

Pour ce qui concerne les besoins des besoins de chaque personne impliquée dans l’entreprise, il est nécessaire à la fois que chaque personne adhère aux besoins de l’entreprise mais également que tous les besoins personnels de la pyramide de Maslow soient pris en compte du côté de l’entreprise.

Il suffit d’un besoin en carence dans l’ensemble des besoins pour saper la bonne marche de l’entreprise et/ou détériorer la qualité de vie au travail. Il est essentiel de saisir que tout le monde est perdant quand un déséquilibre se met en place, l’entreprise comme le salarié ! Nous sommes dans un système et la moindre anicroche a des répercussions sur la totalité, entraînant rapidement un cercle vicieux. Illustrons par divers exemples :

  • S’il s’agit d’un besoin de l’entreprise qui est en carence :
    • Les ventes de l’entreprise sont en chute, cela risque de mettre à mal le besoin de sécurité des salariés. Cela peut questionner d’autres champs qui seraient en défaut comme une mauvaise communication externe. Même si c’est une réaction normale et utile, cela peut révéler d’autres manques comme une perte de sens dans le produit ou service qui est l’âme de l’entreprise… Nous pouvons facilement deviner les réactions en chaîne s’il y a un perte de confiance dans le produit ou service s’il ne représente plus l’essence première de l’entreprise…
    • Un problème d’organisation, de management, une baisse des moyens pour être performant sont tout autant des symptômes qui vont venir gangrener et éroder les besoins de confiance en l’entreprise, de sécurité, de sens du travail, de réalisation, d’utilité de son travail…. Un salarié qui se sent en instabilité dans un besoin cherche, en toute logique, à retrouver un équilibre. Il va immanquablement si l’entreprise ne le prend pas en compte, attaquer et détériorer les besoins de l’entreprise évoqué plus haut, que ce soit par un absentéisme, une démotivation, un désinvestissement, voire un sabotage…
  • S’il s’agit d’un besoin d’un salarié :
    • C’est ce que nous venons d’expliciter dans le point ci-dessus. Un besoin déficitaire d’un salarié va entraîner de facto la quête d’un nouvel équilibre. La résolution sera perdante pour les deux parties si ceux-ci ignorent le besoin déficitaire.
    • Le moindre souci de relation, de communication, de management infantilisant, d’organisation matérielle ou de temps défectueux et la qualité de vie au travail est perdue. Un engrenage délétère se met très vite en place et plus on attend et plus il est compliqué de rétablir le bon cap.

La Qualité de Vie et Conditions de Travail n’est donc pas un épiphénomène, un phénomène à la marge ou la mode. Elle se doit d’être au cœur de l’entreprise. C’est même la condition sine qua non pour que l’entreprise soit performante. Les entreprises les plus florissantes sont celles qui mettent l’humain au centre. Car au fond, la Qualité de Vie au travail se fonde sur l’inscription des valeurs humaines comme stratégie de réussite de l’entreprise.

Voyage Intérieur

Dans la vidéo qui suit, vous trouverez une porte pour aller explorer avec votre enfant intérieur. Cette introspection vise juste à faciliter la connexion avec soi-même. A vous d’inventer votre façon la plus appropriée pour écouter l’enfant en vous :

  • en écoutant une musique et en vous mettant à l’écoute des intuitions, ressentis… qui se présentent,
  • en fermant simplement les yeux et prenant quelques respirations lentes et profondes. Puis laisser venir….
  • en partant d’une question que vous voulez poser à votre enfant intérieur. Vous pouvez dans ce cas, vous la répétez ou l’écrire plusieurs fois jusqu’à ce que des flahs, des images, des ressentis vous viennent….
  • en prenant une feuille et en écrivant sans vous arrêter tout ce qui vous passe par la tête ou en partant d’une image, d’une photo de vous enfant,…

L’important est d’écrire ou dessiner après avoir vécu cette expérience. L’intention est de garder trace de vos impressions, ressentis, découvertes. Vous pouvez écrire comme une histoire ou dessiner symboliquement ce que vous avez ressenti. Il n s’agit pas de faire du beau.